LA LÉGENDE DE SHAO SHEN

 Tout commence sous la XIIème dynastie Qin (dont les origines remontent à 2 siècles avant JC -sans doute une abréviation de JaegerleCoultre vu son utilisation comme « référent temps ») à By Tchur, petite bourgade de la Mongolie nord-orientale bien connue pour ses estaminets où l’alcool frelaté local (le fameux maotaijiu appelé aussi jiudechoo tset pour son goût inimitable) coulait à flots moyennant quelques guang xu (monnaie chinoise de l’époque). Après une soirée particulièrement bien arrosée, Koh Py -le principal protagoniste de cette légende- se trouve embarqué à l’insu de son plein gré à bord du Plougazoal, navire battant pavillon breton et habitué du commerce triangulaire (soie, nouilles et feux d’artifice).
Après un long périple (à cette époque un voyage s’appelait périple parce qu’on était jamais sûr d’arriver à on port, d’où l’expression « voyager à ses risques et périples »), passé dans la cale de dégrisement (les effets du jiudechoo tset peuvent durer plusieurs mois !), voilà notre Koh Py débarqué à Lorient, bien nommé étant donné ses liens commerciaux avec l’Asie…
Vous l’aurez compris, Koh (on va l’appeler par son petit nom s’est plus simple) n’était pas le genre de gaillard à sucer des glaçons et son premier réflexe, une fois le pied à terre, fut de trouver une taverne où pallier à la longue déshydratation dont son périple l’avait affligé…
En poussant la porte du Abohar Tavernec, il ne savait pas qu’il allait changer le cours de l’histoire (de la Chine, mais du monde également !)….
Il s’assoit et, dans un brezhoneg plus qu’approximatif, il commande un pichet de l’alcool du pays, le chouchen. Passé l’étonnement de la première gorgée, il se dit que, en fait, ça valait largement le jiudechoo tset de son pays d’origine. Pour s’assurer de ne pas être sous l’emprise du mal de terre, il s’en fait resservir bon nombre de pichets et finit avec un puh ting (qui veut « sacré » en mandarin ancien) de mal de tête !
À peine remis de ses émotions, notre Koh s’empresse, toujours dans un brezhoneg assez maladroit, de quérir le tenancier du Plougazoal pour lui demander la recette de ce breuvage étonnant et, ô céleste plaisir, absolument délicieux. Briz Dularj (un bâtard, batave par son père et breton par sa mère), fier comme un bar-tabac de se voir, ainsi, susciter l’intérêt de cet étranger bien curieux avec ses yeux d’endormi et son teint hépatique (avec ce qu’il sifflait, pas très étonnant !) ne se fit pas prier et lui confia, l’imprudent, que cette boisson était la version locale de l’hydromel, composée d’eau, de miel, de vanille, de cannelle, de clous de girofle, de poivre, de cardamome, de gingembre et de levure, le tout devant fermenter quelques mois avant d’obtenir le degré d’alcool nécessaire à l’effet d’ébriété recherché… Sans oublier ce qui fait toute la particularité de la saveur inimitable (du moins c’est que l’on croyait…) de ce nectar tout droit descendu du Walhalla par la grâce d’Odin (ce qui donna naissance à 2 expressions nécessairement associées à sa consommation :  « Walhalla ! » après avoir bu la première gorgée et « Odin vaut mieux que deux tu l’auras » lorsqu’on veut se faire servir un autre pichet…) : la présence de dards d’abeilles, réputés pour leur pouvoir aphrodisiaque et leur faculté à procurer l’immortalité… Légende de comptoir ou vérité historique ? Attendons la fin de l’histoire pour nous prononcer…
Est-ce le chouchen qui fit venir à l’esprit de Koh cette brillante inspiration qui allait bouleverser la vie de la plupart des poh shtron (qui veut dire textuellement « leveur de coude » en mandarin ancien) de l’Empire du Milieu ? Nul ne le saura jamais… Toujours est-il que Koh décide alors de rentrer dans son pays essayer de mettre au point l’équivalent de ce breuvage à côté duquel la potion magique d’Astérix n’est qu’un pâle bouillon à l’eau.
Le Plougazoal, reprenant la mer seulement quelques mois plus tard, Koh se résoud alors à reprendre la mer depuis Nantes, capitale des Marches de Bretagne et ville portuaire très active à l’époque grâce à un autre commerce triangulaire (canaris, petits beurres et berlingots).
Après avoir à nouveau testé le chouchen version nantaise, de façon à vérifier la constance sapidique et le pouvoir de transcendance métabolique (plus communément appelé « la tronche en vrac ») de ce qui allait bientôt lui valoir amour, gloire et beauté dans l’Empire du Presque Milieu (en effet, passé un certaine dose d’absorption alcoolique, difficile de viser bien au centre du milieu…), Koh embarqua comme quartier-mètre, qui consiste à mesurer régulièrement la distance entre le col et le fond des dames-jeannes entreposées dans certaines parties des cales des navires (parties elles-mêmes baptisées « quartiers » puisqu’elle représentaient chacune ¼ de la surface disponible) sur le Kermazout en partance pour les Iles du Levant afin de s’y livrer à son propre commerce triangulaire (Kerozen, mar et noar).
Le périple (toujours) ne fut pas sans risque, surtout pour notre Koh qui, prenant sa tâche très au sérieux, s’efforça de faire en sorte que la distance à mesurer (cf.ci-dessus) dans les dames-jeannes progresse régulièrement. Il n’hésitait pas, pour cela, à donner de sa personne, se comportant comme le poh shtron (cf.ci-dessus) qu’il était. Si l’équipage ne put que s’incliner devant tant de professionnalisme, l’évaporation de la totalité des réserves liquides que ce dernier provoqua faillit bien coûter la vie à Koh, l’ire des matelots les incitant à le faire sécher au bout de la grand-vergue pour lui apprendre les affres de la déshydratation !
Mais la ruse et la persuasion sont à l’asiate ce que l’intelligence et la culture sont aux bonnes gens de nos contrées : un seconde nature. Trouvant dans la cambuse les ingrédients nécessaires à sa préparation, Koh entrepris de fabriquer la boisson qui l’avait tant frappé lors de son séjour celtique. Habile à manier la poudre et le feu, il eut même l’idée de faire chauffer la mixture afin d’accélérer le processus de fermentation ! Sont-ce les influences conjuguées de Confucius, Lao Tseu et Bouddha qui l’inspirèrent ?… Toujours est-il que son essai transformé apaisa dans l’instant les gosiers desséchés des marins (qui n’étaient pas d’eau douce mais plutôt d’alcool fort !) du Kermazout. Mieux, il devint aussitôt l’objet de leur vénération, comme avait pu l’être un certain Panoramix avec les habitants d’un petit village gaulois qui…mais c’est une autre histoire !
Sans vouloir minimiser la prouesse de Koh, elle eut, cependant, une conséquence qui aurait pu réduire à néant ses rêves naissants de gloire (amour et beauté aussi, bien sûr !) : la technique très personnelle de production qu’il avait mis au point renforça de manière impressionnante le pouvoir de transcendance métabolique (cf. ci-dessus) de son interprétation du chouchen version originale… Résultat : l’ensemble de l’équipage du Kermazout mis plusieurs trimestres à retrouver ses esprits et la route maritime de l’Empire du Plus Vraiment au Milieu (cf. ci-dessus également, faut suivre, ta made ! – « merde » pour les sinologues) ce qui, point positif, mit Koh dans l’obligation de répéter -et donc de perfectionner- sa préparation….
Bref, presque plus d’un an après avoir quitter les côtes Nanteizh, Koh Py foulait à nouveau le sol du Royaume de la dynastie Qin, la légende était en marche…
Fort de sa parfaite connaissance de la plupart des troh khè (estaminet chinois) de l’Empire de Plus en Plus Loin du Milieu  (souci d’orientation et de repérage géographique pour Koh, consécutif à l’obligation à laquelle il avait dû se plier de goûter sa préparation avant d’en servir des rasades aux matelots du Kermazout !), Koh entreprit alors de les démarcher pour leur faire goûter cette boisson extraordinaire qu’il ramenait de son périple (hé oui, toujours !) des lointaines terres d’Armorique… Le succès fut plus fulgurant que le plus magnifique des feux d’artifice dont son pays revendiquait l’invention (pour une fois qu’il inventait quelque chose…) et Koh fut très rapidement débordé par les commandes provenant des quatre coins de l’Empire du Milieu (en même temps, un milieu avec quatre coins c’est pas vraiment de la géométrie euclidienne… mais bon, on va pas en faire un tsatsiki !).
Pour répondre à la demande, il s’adjoignit alors les services d’un ami de toujours, bien que plus jeune, le petit Lu qui partageait avec Koh cette capacité incroyable à être, la plupart du temps, bien beurré… L’idée leur vint même de mettre à contribution les enfants de leurs familles mais, Nike et Apple n’ayant pas encore songé à cette solution très économique, ils se résolurent, finalement, à patienter encore quelques siècles.
Néanmoins, en aussi peut de temps qu’il en faut à un guerrier Xian (prononcer « chiant », parce que la guerre c’est de la merde !) pour tru xi deh (« tuer » en mandarine pas encore mûre) son adversaire, tout l’Empire du Mlileu, du Lmimleu, du Mieumieu…palsembleu, crotte de bique !…tout le pays était devenu ah qrô (je traduis ?) au chouchen version Koh…
Tant et si bien que la nouvelle du succès de cet élixir fabuleux ramené de contrées éloignées finit par arriver aux oreilles de Tcha Rh Leu, 18ème empereur de la dynastie Qin et surnommé l’Empereur à la Barbe Fleurie (rapport aux floracées et légumineuses en tout genre qui parsemaient son auguste pilosité faciale après chaque repas). Impressionné, Tcha Rh Leu Qin n’eut de cesse d’y avoir goûté et fit, toutes affaires cessantes, quérir Koh Py et petit Lu dans ce but.
Ces derniers, tremblant de tous leurs membres (on tremble toujours devant l’Empereur de Chine, les voisins nippons en savent quelque chose) se présentèrent donc, sans délai, devant ce que tous ses sujets considéraient comme le souverain le plus puissant du monde connu et, même, inconnu…
Tcha Rh Leu goûta. La première surprise d’une saveur nouvelle passée, Tcha Rh Leu aima. Il re-goûta. Il re-aima. Il re-goutâ  par la suite à de très nombreuses reprises et finit par ne plus très bien savoir de quel milieu il était empereur…
Nonobstant, une petite pause dans le (re)goûtage lui laissa le temps de demander à Koh quel était le nom de cette boisson si….intéressante. Pris un peu au dépourvu, Koh répondit « chouchen » mais Tcha Rh Leu entendit « shao shen », ravit à l’idée que ce merveilleux produit portait une dénomination locale.
Enchanté par un telle découverte, Tcha Rh Leu éléva sur le champ Koh au rang de gong (prince) ce qui le sonna un peu, il fait bien le rapporter, et lui indiqua que, désormais, il serait honoré sous le patronyme de Shao Shen que portait son invention extraordinaire. Son alcoolyte devint « Ti » Lu (une sorte de titre honorifique équivalent à l’Ordre de la Gerbetière britannique) et s’en alla se beurrer copieusement l’œsophage pour fêter ça !!!
C’est ainsi que la spécialité armoricaine (le chouchen pour ceux qui lisent en diagonale) devint la première contrefaçon à mettre à l’actif de l’Empire de là où il veut, Koh Py -heu, pardon Shao Shen- donnant ainsi naissance à un tradition que les futures générations chinoises allaient s’attacher à entretenir et même à développer dans des proportions que Shao Shen lui-même n’aurait jamais pu imaginer, même après avoir ingurgité des fu (sorte de barrique) entiers de…bon, je vais pas vous le redire !!!

Li Hô Nè Leu (historien officiel de l’Em(bien)pire que ça !)

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2 commentaires pour LA LÉGENDE DE SHAO SHEN

  1. Naïck dit :

    Un régal… pour les yeux, l’esprit, les zygomatiques…et virtuellement pour les papilles ! J’aime ta plume ! Bisous dard-dard

  2. Tcd dit :

    Fabuleuuuux !!!

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