La côte

Difficile à grimper. Facile à dévaler. Une côte.
C’est unanime. Et constant.
Y compris pour la « côte » de popularité. Il ne suffit pas d’avoir du mollet, de la résistance, de l’entraînement et de la pugnacité.
Il faut aussi avoir de la chance.
Plus exactement pouvoir bénéficier de certains événements.
Heureux ou malheureux.
Des événements qu’on ne décide pas. Qu’on ne provoque pas. Qui ne dépendent pas de nous. De notre volonté.
Des événements qui se produisent simplement en dehors de nous. Même si nous en sommes témoins. Même si nous cherchons à devenir acteurs de leurs conséquences. Comme pour nous les approprier d’une certaine manière. Comme pour dissimuler le fait que nous n’y sommes pour rien.
Comme au loto, ça peut rapporter gros.
Mais la mise n’est pas la même. Pas du tout.
Il suffit de regarder les 4 semaines qui viennent de s’écouler pour s’en rendre compte : 28 morts violentes dans des circonstances tragiques et insupportables.
Ça émeut, ça fédère, ça rassemble, ces morts-là.
Peut-être parce qu’elles nous renvoient à la seule vérité de notre destin…
Elles sont « historiques ».
Ce qui s’en est suivi est« historique ».
Comme le 5ème titre mondial des handballeurs français. Une vingtaine de sportifs qui ont mis leurs tripes dans cette conquête.
Ça aussi, ça émeut, ça fédère, ça rassemble.
Sans doute parce que ça nous fait croire qu’on peut être plus fort que la fin inéluctable où nous conduit notre destin.
Oui, tous ces événements, dramatiques ou fantastiques nous amènent à vouloir surpasser (oublier ?) une idée, une seule : nous ne sommes que de passage…
Alors, dans ces circonstances, pour certains, ceux qui sont « aux responsabilités », il suffit de faire ce pour quoi nous les avons mis là où ils sont. De « faire le job ». Et, hop, la magie de l’effroi ou de la sur-joie fait son office et la côte, leur côte, qui frôlait des profondeurs abyssales peu avant, se redresse. Et se met à penser que sur cette lancée elle pourrait aller tutoyer les sommets…
Pourtant, très vite, trop vite qu’en reste-t-il ? Chômage en perpétuelle augmentation, détresse d’une partie grandissante de la population, psychose généralisée, proliférations des actes antisémites et anti-musulmans, FN en tête d’un scrutin local…
Chacun se retrouve alors devant la réalité banale de sa propre « côte de popularité ». Au boulot, dans sa famille, avec ses enfants, ses proches, dans sa vie amoureuse… Et doit se débrouiller seul(e).
Pas d’attentats, ni même un banal accident, encore moins une belle victoire au championnat local de pétanque (je n’ai rien contre, c’est un exemple) pour redorer son blason. Pour braquer les projecteurs de notre actualité intime sur ce qui nous arrive, ne nous arrive pas, sur ce qu’on voudrait, sur ce que l’on espère…
Un élan populaire est toujours saisissant, enthousiasmant, rassurant. Je crois, cependant, qu’il n’est que l’agrégat de nos aspirations individuelles (à la réussite, au bonheur…) et que dans ces circonstances il nous permet de croire que tous ces gens rassemblés autour de nous, d’une certaine façon, sont aussi là pour nous aider à y parvenir…
Juste une illusion.
Pas un terroriste ne vous fera oublier votre licenciement.
Pas un exploit sportif ne l’emportera sur votre chagrin d’amour.
Pas un attentat n’effacera la perte d’un parent.
Personne ne changera l’orientation, la direction, la progression de votre vie à votre place.
Personne.
Vous seul le pouvez.
Alors, battez-vous !

« Ma côte de popularité ne doit rien à la folie des uns ou au sang des autres. Ni à la performance des uns ou à la sueur des autres. Si elle s’inverse, en particulier positivement, elle ne le devra qu’à moi. C’est ce qui me rassure. Et me donne de l’espoir. Beaucoup d’espoir. »
Léo Myself

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