À cheval sur les principes

Il y a des lustres. Un paquet même. De quoi garnir la Galerie des Glaces à Versailles. Voilà donc très longtemps. Dans le nord de l’Europe. Qui ne l’était pas encore. L’Europe. Le Nord, lui, remplissait très bien son rôle. En toute connaissance de cause.
Bref, dans le Nord et il y a un sacré bail vivait ainsi des tribus barbares, entre Vistule (comment veux-tu, comment veux-tu…) et Oder (de bagarre…).
Leurs incursions répétées dans les steppes de l’Oural voisin en firent rapidement des cavaliers émérites, comme en témoignent – de façon certes un peu abrasive – des toiles de l’époque, les fameuses « toiles émérites ». D’invasion en conquêtes et de conquêtes en colonisation, leur réputation s’établit sans tarder, en faisant les master chefs du pillage. Comme la plupart des autres peuplades. Enfin, presque.
Car s’ils pillaient, ils le faisaient avec un grand soin et un modèle d’organisation : accords passés avec les vaincus, ville quadrillée en secteurs et méthodiquement passée au peigne fin (une invention qu’on leur doit sans doute) afin d’emporter toutes les richesses sans destructions ni massacres…
Malgré leur relative modération, surtout au regard des exactions commises par les Huns et les autres, leur nom est resté à la postérité.
Les Vandales.
Ils semblent avoir, aujourd’hui encore, des héritiers. Qui n’ont retenu que le stéréotype transmis par l’histoire.
Et qui ont, apparemment, oublié qu’en ce temps-là, lorsqu’on pillait, c’était pour s’approprier le bien d’autrui et s’en servir à son profit.
Pas pour le détruire. Par plaisir. Ou par désœuvrement.
Ou pour tout autre motif marqué du sceau de la bêtise la plus insondable.
Les Vandales ne vivaient pas vieux. Question de faible maillage hospitalier et de mode de vie à risque.
À l’heure actuelle, leurs descendants putatifs ont toutes les chances de doubler l’espérance de vie de leurs aïeux. Et de sévir bien davantage.
D’autant qu’ils commencent tôt. Très tôt.
Une école maternelle saccagée par des 5-13 ans. La salle d’activité plus exactement.
Là où on apprend rien d’autre qu’à s’exprimer. Pour ça, ils se sont exprimés, les Vandalitos ! À coup de pots de peinture projetés sur les murs et les sols.
Pas sûr que ça finisse en expo au Grand Palais, ceci étant.
Mais avec l’âge, faire les cons avec des boites de Caran d’Ache et des pastels gras, ça met peut-être un peu de couleurs dans la journée. Mais, à la longue, ça lasse.
Alors on trouve un autre terrain de jeu.
Un cimetière par exemple. Au moins, on ne risque pas d’être dérangé !
Et vas-y que je te retourne les crucifix, que je te pète les plaques funéraires, histoire de voir si les habitants des lieux rouspètent !
« Dégradations volontaires susceptibles d’être l’œuvre de jeunes pour faire les idiots », dixit notre Chef Ministre Premier…
D’abord « œuvre », rien n’est prouvé, le marché de l’art est tellement volatile.
Ensuite, quand l’idiotie se confond à ce point avec la connerie la plus aboutie, là oui, c’est un chef d’œuvre !
Du haut de nos 18 siècles d’évolution et de civilisation, on persiste à considérer les Vandales comme des sauvages.
Des sauvages qui respectaient leurs ennemis.
Qui respectaient le bien d’autrui.
Même (surtout ?) pour se l’approprier.
Qui respectaient les règles.
Y compris les règles barbares.
Qui respectaient leurs montures.
Finalement, qui étaient très à cheval.
Sur les principes.
Sur lesquels s’assoient allègrement
Leurs indignes successeurs…

« Lorsque le mot respect devient une injure, le mot civilisation a tout du parjure. »
Léo Myself

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