En panne

en-panneVoilà quelques jours, j’enfourche mon destrier. Avec ses deux roues, il est plus qu’économe en avoine, ne chie pas sur la voie publique ni ailleurs. D’humeur égale en toutes circonstances, il se révèle docile à l’usage et toujours de bonne composition. En outre, en cette période de l’année où les jours sont aussi courts que le solde positif de mon compte en banque, il est joliment équipé de lumières. Devant, éclairage blanc semblant nous faire croire qu’il va éclairer notre chemin. Rouge à l’arrière, pour signaler le danger potentiel que je suis aux autres usagers de la voie publique. Ceci étant, à ma connaissance, rares sont les cas d’automobilistes envoyés ad patres par des cyclistes ayant agressé la portière de leur véhicule qu’ils venaient d’ouvrir violemment en toute innocence.
Bref, je m’achemine donc sur Vélo (c’est le nom que je lui ai donné), bravant la froidure et la distance pour retrouver des amis dans leur nouveau château. Et par la même occasion, leur souhaiter une année à venir exempte des tracas que tout un chacun rencontre, parfois, durant ces 12 mois qui n’en finissent jamais de contredire les vœux ingénus que nous formulons à son avènement…
Là, je réalise que j’écris un peu comme Alain Duhamel. Ou plutôt comme il parle.
2017 ne débute pas bien, c’est évident…
Ressaisissons-nous !
Vélo chemine, je l’aide un peu. Uniquement dans les côtes. La brume tombant, je m’arrête. Pour l’aider. À se relever. Elle m’envoie faire foutre. Je l’abandonne à son triste sort. Puisque sans visibilité.
Poursuivant mon périple, je décide de couper court. Moins je mettrai plus de temps à toucher au but, plus je me les gèlerai beaucoup moins. Je fais jouer les éperons. Les mollets aussi. Et j’opte pour un raccourci. Sens interdit, certes. Mais bon sens aussi. Au plus court, au plus vite.
Vélo est habitué. Il sait parfaitement passer de la rue au trottoir. Comme d’autres le font du coq à l’âne. Entre pénombre et semi-obscurité, nous nous frayons un chemin. Quand surgit l’inattendu. L’improbable.
Accroupie devant la calandre d’une voiture, une silhouette. Visiblement occupée. Préoccupée, même. Je tire sur les rênes (les freins, pour ceux qui méconnaissent ce genre de monture). Ralentissant notre course, nous voilà en approche discrète. Ne pas effrayer le passant fait partie de mes règles. Au trot. Puis au pas. Je hèle l’inconnu(e). M’enquérant de ses difficultés. Lui proposant mon secours.
Je ne suis pas expert en mécanique automobile. Mais, néanmoins, je sais faire la différence. Entre une tête de delco et un carburateur.
Son mutisme m’inquiète. Est-ce si grave ? Nous approchons un peu plus, Vélo et moi. Je réitère ma proposition d’aide.
Un vague murmure sourd de ses lèvres. Peu explicite. Presque mystérieux.
Mon émoi ne fait qu’en croître. Pour le coup, je m’inquiète vraiment.
Quelques pas de plus. Je découvre son visage.
Juvénile. Et crispé. Féminin aussi.
Immédiatement, je ressens le désarroi. Qui l’habite.
Sur le point de mettre pied à terre, une étrange sonorité m’interloque.
Comme un petit ruisseau.
Son regard me fixe. Illuminé par une gêne palpable.
Elle est toujours dans la même posture.
Le souci n’est pas le moteur. Davantage un problème de durite.
Pas du véhicule.
Nul besoin que j’intervienne. Si ce n’est passer mon chemin.
Je comprends qu’il vaut mieux laisser pisser.
Au sens pas très propre.
Et pourtant indispensable, semble-t-il.
De toute évidence, chacun peut trouver sa solution.
Face à une panne.
Même une panne sèche.
Ou pas…

« De deux maux, il faut choisir le moindre. En deux mots, une envie pressante est avant tout une question d’urgence. Plus qu’un sujet de bonne contenance… »
Léo Myself

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Un commentaire pour En panne

  1. Arnaud dit :

    Et là…..comme un con, Jean-Pierre !!

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